La violence
Dans la salle d’entraînement, je sue à grosses gouttes. Les cours de cardiovélo (spinning), de zumba et de cardio à intervalles pointent tous dans la même direction : je suis en piètre forme physique. Je me regarde dans le miroir, j’ai pris du poids, je me juge, me compare, bref, je me fais violence. Pas besoin de personne pour se faire mal. Cela vous dit quelque chose, l’autocritique?
La bienveillance
Toutefois, et en même temps, je tente de me calmer et d’être bienveillante envers moi-même. Je choisis même de rire d’un de mes faux pas de danse aérobique. Je suis en dehors de ma zone de confort. Cela fait plus de trente ans que je n’ai pas fait ce genre d’activité. Je félicite mon courage. Je pense aux paroles que je disais à tous ces apprentis médiateurs que j’ai formés : « Vous apprenez, acceptez de ne pas être parfait en commençant. » Malgré mes efforts, mon autoviolence me rejoint et me fait mal.
Mes besoins insatisfaits face à l’autocritique
J’ai besoin de comprendre ce qui se passe. Pourquoi cette dureté? J’aspire à plus de douceur, de paix et de joie. Je n’aurais pas dû négliger autant ma forme physique, c’est mon erreur. Mais suis-je obligée de me détester autant? Je choisis donc de me tourner vers les principes de la communication non violente élaborés par Marshall B. Rosenberg.
Les tactiques du chacal
Comme le souligne M. Rosenberg, nous avons tous un « chacal » en nous; un héritage de notre éducation. Notre chacal peut s’exprimer extérieurement, mais aussi intérieurement. Il utilise la réprimande, la punition ou d’autres tactiques violentes avec pour résultat trois émotions principales : dépression, honte et culpabilité. Pour ma part, je me sens déçue et découragée, ce qui est une sous-émotion de la dépression. Bref, le chacal touche à mon estime de soi, et ce qu’il veut m’enseigner me coûte cher moralement.
L’enseignement du chacal
En réfléchissant, je découvre que mon chacal veut m’enseigner que mon besoin d’estime de soi est insatisfait. Je veux bien vieillir, être en santé, perdre du poids et j’ai l’impression que tout cela m’échappe. Les années me rattrapent! Comme disait mon amoureux avec respect : « Donne-toi une chance, tu n’as plus trente ans. » Je me suis mise à rire et je me suis écriée : « Mais je ne ressens pas mon âge! » Je réalise mon besoin d’être plus en amour avec mon corps et de faire le deuil de ma jeunesse. Comprendre mes besoins insatisfaits m’aide à les accepter et à me sentir moins en faute. Je m’apaise grâce à une forme d’auto-empathie.
Si vous désirez vous apaiser face à l’autocritique, voici les étapes à suivre.
- Reconnaître la voix du chacal (autocritique, jugement sévère, dénigrement, etc.)
- La culpabilité, la honte et la dépression sont trois émotions baromètres qui indiquent que vous vous faites violence. Cela peut être une autre émotion inconfortable.
- Déterminer quels sont les besoins insatisfaits lorsque vous vous faites violence (dans mon cas : compréhension, douceur, joie et paix)
- Déterminer quels sont les besoins insatisfaits qui sont à l’origine des reproches du chacal. Dans mon cas, il m’enseigne que mon estime de soi et mon besoin d’amour et de deuil sont insatisfaits.
- Ressentir s’il y a un apaisement qui s’installe, sinon, refaire ses devoirs dans la détermination des besoins insatisfaits.
Notre chacal n’est pas notre ennemi. Par contre, il ne connaît pas les rouages de la non-violence. C’est à nous de lui apprendre et d’être empathique face à lui. Ce qui est merveilleux, c’est que plus nous faisons connaissance avec lui, moins il devient féroce et plus il devient pacifique. Maintenant, lorsque je m’entraîne, il y a plus de douceur et d’acceptation face à « mon état » et j’honore chaque petit dépassement. Je sais que j’ai besoin de me donner du temps et de la joie pour continuer ma remise en forme. Voilà un beau chemin vers la paix intérieure et extérieure.
Marshall B. Rosenberg, « Parler de paix dans un monde de conflit », Jouvence Édition, 2009, p. 75 à 92.