Dans la plupart des conflits, il arrive un moment où les parties d’une médiation doivent choisir entre la paix et la bataille. Cependant, même si elles choisissent le chemin de la paix, cela ne sera pas nécessairement un gage de sérénité, car il existe différentes sortes de paix.
ACHETER LA PAIX
Acheter la paix ressemble davantage à une capitulation; épuisée de se battre, la personne finit par céder ou encore elle choisit de taire ses demandes pour éviter tout conflit. La personne cherche généralement à minimiser les risques entraînés par toute bataille. Ces risques se caractérisent par la perte de temps, d’argent, d’intérêt, d’influence, de relations, etc. Considérer la paix, c’est faire un calcul. Ce n’est pas mal en soi, au contraire, ces mathématiques s’avèrent nécessaires. Toutefois, en achetant la paix, la personne a l’impression d’abandonner son pouvoir et de ne pas répondre à ses besoins ou à ses aspirations profondes soit de manière consciente ou inconsciente. Dans cet état d’esprit, acheter la paix peut apporter de l’amertume et de la colère dans l’immédiat ou des regrets dans le futur. Certaines personnes diront : « Je n’aurais pas dû céder, je le regrette, j’aurais dû prendre plus de temps, du recul, etc. » Finalement, le choix se fait dans un état de victimisation, ce qui bloque le processus de deuil et rend le pardon difficile à faire.
CHOISIR LA PAIX
Choisir la paix implique aussi que les mathématiques occupent une place dans le processus. L’une des parties prend sa décision tout en étant pleinement consciente de ses aspirations. Elle fait de la paix un besoin prioritaire à combler. La personne comprend et reconnaît les émotions qui l’habitent (colère, peur, tristesse, déception, etc.), mais ce ne sont pas elles qui dictent entièrement sa conduite. L’intelligence est au rendez-vous.
Dans cette optique, les parties exprimeront leurs demandes et le pouvoir de négocier sera au rendez-vous. Des solutions dans un espace de « cocréation » et mutuellement satisfaisantes pourront naître. Si la personne choisit de se taire, ce n’est pas parce qu’elle a peur, mais parce qu’elle fait preuve de sagesse et de courage.
C’est dans la pleine responsabilité de ses décisions, et non en tant que victime, qu’elle choisit la paix. Il s’agit pour elle de la meilleure décision à prendre. Cela ne signifie pas qu’il n’y aura pas de tristesse ou de déception, mais celles-ci s’atténueront avec le temps en raison du processus de deuil normal. Choisir la paix consiste à se tourner vers le futur de manière sereine et à continuer son chemin en riche héritier d’une expérience difficile. Le médiateur peut sentir ce choix, car les personnes repartent souriantes et satisfaites de son bureau.
COMMENT AIDER NOS CLIENTS À CHOISIR LA PAIX?
Voici quelques techniques simples et efficaces :
– Assurer un cadre sécuritaire et respectueux d’échanges et rappeler les objectifs habituels de la médiation. La médiation n’est pas un lieu de bataille;
– Faire en sorte que les parties se concentrent sur les faits et non sur les suppositions, les interprétations et les jugements;
– Déterminer la liste des besoins des parties et leurs priorités;
– Reconnaître et faire nommer les émotions au cours de la médiation, en plénière ou en caucus;
– Faire évaluer, de manière réaliste, les risques d’une bataille versus les avantages de la paix;
– Si nécessaire, et en caucus, suggérer aux parties qu’elles peuvent bénéficier de soutien psychologique;
– Si les parties ne sont pas représentées ou avisées de leurs droits et des enjeux, suggérer et même exiger que les parties consultent un avocat ou un autre professionnel à l’extérieur du cadre de la médiation.
Nous, les médiateurs, avons tout intérêt à ce que les parties terminent leur médiation avec un sentiment de satisfaction. Il y va de la reconnaissance de la médiation comme une méthode des plus intéressantes.